Sourceur de matières premières : l'Indiana Jones de la parfumerie

Imaginez-vous être payé pour découvrir le monde... L'idée fait rêver, non ? Avant de vous figurer des influenceurs en publi-reportage à Dubaï, rassurez-vous : on parle d'un vrai métier. Celui de sourceur en parfumerie, méconnu du grand public et qui a pourtant certainement joué un rôle dans le parfum que vous portez aujourd'hui.

La mission principale d'un sourceur est de parcourir le monde à la recherche de nouvelles matières premières, qui seront ensuite utilisées dans vos parfums ou cosmétiques sous forme d'huiles essentielles. Car oui, chaque année, les grands acteurs du parfum ajoutent de nouvelles matières premières à la palette des parfumeurs, afin d'élargir le champ des possibles ! 

Pour vous expliquer comment fonctionne ce métier de sourceur, nous sommes allés faire un petit tour chez Mira, une marque d'huiles naturelles dont les fondateurs mettent un point d'honneur sur la qualité des matières premières et leur traçabilité.

Sea view

Le métier de sourceur : voyage, voyage 

Commençons par le début : que font vraiment les sourceurs, ces Marco Polo des temps modernes ?

Comme l'explique Stéphane Piquart, célèbre dénicheur de matières premières, la mission d'un sourceur est à la fois de rechercher de nouveaux ingrédients naturels partout dans le monde, mais aussi d'étudier des plantes qui sont déjà connues pour trouver d'autres façons de les cultiver et de les utiliser. Le voyage s'effectue souvent avec des guides locaux, parfois dans des contrées très reculées, en 4x4, à pieds, à cheval...

Si ce métier fait rêver sur le papier, il ne s'agit pas seulement de s'aventurer dans la nature tel Indiana Jones, sur fond de paysages à couper le souffle. Le sourceur en parfumerie à aussi une part de responsabilité environnementale, économique et éthique afin de proposer une matière première durable à ses clients, qui sont d'ailleurs très variés.

Les clients du sourceur peuvent tout aussi bien être :

  • Les grandes marques de parfums, qui sont à la recherche d'ingrédients rares pour créer leurs fragrances
  • Les maisons de composition de parfum : il s'agit des acteurs qui créent les parfums pour les marques n'ayant pas de parfumeur en interne (soit la très grande majorité des marques de parfum). Dénicher des odeurs rares leur permet à leur tour de gagner des clients parmi les marques de parfums.
  • De plus petits acteurs de la parfumerie - ce qui est plus rare lorsqu'on connait le coût de la recherche d'une matière première (spoiler: c'est à nombre à plus de 6 chiffres).

En clair, les clients du sourceur sont tous ceux qui souhaitent trouver de nouveaux fournisseurs de matières premières dans le monde entier afin de les utiliser dans leurs cosmétiques (parfums, crème, huiles, etc.). Il y a souvent un véritable enjeu de compétitivité derrière cette recherche de nouveaux ingrédients : pouvoir être le seul à revendiquer l'usage de telle matière, ayant tel bénéfice, garantit un avantage concurrentiel à long terme...

Combien sont-ils, ces aventuriers des odeurs ? Impossible de le savoir vraiment, mais leur nombre est probablement très réduit - si on devait prendre le pari, on dirait une centaine maximum. Sourceur en parfumerie est un métier exigeant, et le marché fonctionne en vase clos, organisé autour de quelques très grandes sociétés clientes.

Sourcer pour le long terme 

Jungle

Sourcer une matière première est bien plus complexe que ce l'on pense. Il ne suffit pas de trouver une nouvelle plante, de la présenter aux acteurs du parfum et de les laisser gérer la suite.

Avant de s'aventurer dans quoique ce soit, le sourceur doit s'assurer que la filière de cette nouvelle plante sera pérenne, c'est-à-dire que son client pourra produire et récolter une quantité importante de cette plante pendant des années sans perturber ni le mode de vie des populations locales ni l'environnement qui les entoure.

Miser sur une nouvelle matière première demande d'investir en moyenne 120 000 à 150 000 euros, juste pour l'enregistrer sur les marchés où elle sera utilisée. Il est donc essentiel de se rendre sur place pour cadrer le partenariat : communiquer et négocier avec les producteurs locaux pour poser les termes d'un accord respectueux de l'environnement et de l'humain, qui assure aux maisons de composition une quantité et une qualité de matières premières optimales sur plusieurs années. La tâche n'est pas facile, surtout quand les populations locales dépendent entièrement de ces cultures pour leur développement économique.

Mira, le sourcing éthique entre la France et Madagascar

Chez Mira, qui produit des huiles végétales, le sourcing éthique est au cœur de la démarche ! Les trois fondateurs, Juliette, Dorian et Andy se fournissent auprès de 30 partenaires à Madagascar et en France, deux pays qu'ils connaissent très bien. Ils aiment donc se déplacer au moins une fois par an sur le lieu de sourcing, pour voir de leur propres yeux la production et s'assurer que la qualité de l'huile est optimale. "La qualité est très importante pour nous" assure Dorian, "et on est prêts à payer plus cher pour un meilleur produit. C'est le message qu'on essaie de faire passer aux producteurs pour encourager les pratiques vertueuses". Pour s'assurer de la qualité, Mira évite les grossistes et vérifie que la matière première choisie vient toujours du même village : cela leur permet d'être 100% certains de la traçabilité de la production vis-à-vis de leurs clients.

C'est d'autant plus important que le sourcing n'est pas épargné par le marché gris et les pratiques trompeuses... Par exemple, une fraude classique en parfumerie est de "couper une huile essentielle", c'est-à-dire vendre une huile qui n'est pas pure, en la mélangeant avec d'autres huiles de provenances différentes et de moins bonne qualité. Par exemple, couper de la rose avec un peu de géranium, qui est moins cher, permet au fabricant de baisser les coûts en restant ni vu, ni connu... Quand il ne s'agit pas carrément de mélanger à des ingrédients synthétiques. Bref, la traçabilité est essentielle pour se prémunir de ces problèmes.

Sac à dos, sac à dos

À votre avis, quel est l'attirail du sourceur lorsqu'il part à la chasse aux ingrédients rares ?

Si vous vous imaginez une sorte d'Indiana Jones version parfumerie, eh bien... vous avez raison. Le sac à dos du sourceur contient tout le matériel nécessaire à la découverte et l'analyse des matières premières, c'est-à-dire :

  • Un headspace. Jusque-là ça ne vous dit rien - et c'est normal. Le headspace est une technologie récente : c'est une sorte de pompe reliée à une bulle en verre, permettant d'encapsuler l'odeur d'une fleur sans l'abîmer ou la déraciner, afin de l'étudier par la suite. Pour faire simple : le sourceur dépose la bulle autour de la fleur en question comme sur la photo ci-dessous, et la machine analyse la composition de l'air autour de la plante pour identifier les molécules qui composent son effluve. On obtient ainsi le profil exact de l'odeur que dégage la fleur... Ingénieux, non ? C'est par cette même technique que l'on reproduit, par la synthèse, l'odeur de fleurs ou de plantes muettes comme le lilas, la violette, etc. Ce sont des fleurs qui dégagent une sublime odeur dans la nature, mais dont la distillation est impossible pour des raisons techniques ou économiques.

    Flower headspace
  • Un alambic. Si vous êtes amateur de parfum ou de très bons spiritueux, vous avez certainement déjà entendu parler de cet objet. C'est tout simplement l'appareil qui sert à transformer une matière première en huile essentielle grâce au principe de la distillation à la vapeur d'eau. On fait chauffer sur place la matière que l'on veut transformer (feuilles, fleurs, épices, racines, etc) dans de l'eau bouillante, on récupère la vapeur d'eau qui s'en échappe, et on la refroidit afin de la condenser en une huile très parfumée. Même s'il existe des petits modèles à utiliser directement sur le terrain, distiller en pleine forêt n'est pas chose facile et les sourceurs s'appuient souvent sur des producteurs locaux qui disposent d'alambics plus conséquents. 

À la recherche de l'huile perdue

Quand on vous disait d'imaginer Indiana Jones, on n'avait pas tout à fait tort. Recherchez des huiles brutes ou des matières premières originales et pérennes, c'est un peu comme chercher une aiguille dans une botte de foin (qui est par ailleurs une très belle matière première de parfumerie... une pensée pour le premier qui en a distillé). Et pourtant, c'est le quotidien des sourceurs comme Stéphane Piquart ou d'entrepreneurs comme les fondateurs de Mira.

Par exemple, pour trouver de l'Elemi (celui que vous pouvez retrouver dans notre parfum Bataille), la résine d'un arbre de 30 mètres de haut qui dégage une magnifique odeur évoquant le poivre et l'encens, Stéphane a dû partir en expédition accompagné d'un guide dans la forêt malgache pendant plusieurs jours. Une aventure menée en collaboration avec l'ONG Cœur de Forêt, qui veille au respect des arbres lorsqu'on récolte leur résine. Résultat : un partenariat équitable établi sur le long terme, avec environ 500 kg de matière achetée chaque année.

cactus tree

Chez Mira, les expéditions sont beaucoup plus calmes - ouf - même si trouver des fournisseurs exclusivement français ou malgaches représente une vraie contrainte. Essayez donc de trouver un producteur de figue de barbarie à Madagascar alors qu'elle est originaire du Maroc... Quand la quête devient vraiment impossible, la solution est de produire soi-même. C'est ce que Mira a choisi de faire pour son huile de carotte. À défaut d'en trouver de bonne qualité et à un prix raisonnable en France, Mira a créé sa propre huile en s'approvisionnant avec des carottes "moches" (entendez, des carottes pas parfaites) que les agriculteurs n'arrivaient pas à vendre sur les marchés. C'est ainsi qu'on fait à la fois de la qualité, et du développement durable...

Et voilà, vous savez tout sur le sourcing ! Alors, prêt à partir à l'aventure pour dénicher des odeurs inconnues ? Si vous préférez le confort de votre canapé, voici quelques conseils pour tester les ingrédients superbes de Mira :

Les tips sur mesure de Mira

  • Pour ceux et celles qui se maquillent, vous avez sûrement déjà du tester des dizaines de démaquillant : biphasé ou non, sous forme d'huile, de lait, de crème. Laissez tout tomber et optez pour des huiles pures et naturelles. Mira vous conseille l'huile de noix de coco, de jojoba ou encore l’huile d'avocat.

  • Les beaux jours sont revenus et vous avez pris quelques couleurs... voire un peu trop ? Pas de panique : pour apaiser le tout, Mira conseille d'appliquer localement de l'huile de Moringa sur une peau sèche et propre 2 à 3 fois par jour.

  • Messieurs, vous qui avez toujours rêvé d’avoir une barbe parfaite, optez pour un mélange d’huile de ricin avec quelques gouttes d’huile essentielle d’ylang-ylang. Un combo parfait pour favoriser la pousse et la souplesse de votre barbe.

  • Et pour des cheveux soyeux, utilisez l'huile de jojoba. Cette huile sèche s'applique sur toutes les longueurs, sans laisser de fini gras. Si ce n’est pas beau ça !

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Photos : Nick Prideaux, Andrés Medina, Inconnus
Source : The Fragrance Foundation France


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